La place financière suisse soutient l’expansion du charbon dans le monde
Le 15 février 2022 un consortium de trente ONG internationales a publié la liste des banques qui prêtent ou qui investissent dans des entreprises de la Global Coal Exit List (GCEL), qui rassemble les 1032 entreprises les plus actives dans la filière du charbon dans le monde. Alors que sortir du charbon est l’action la plus urgente à mener pour contenir le réchauffement à 1,5 °C, la place financière suisse continue de soutenir massivement cette filière.
Selon la recherche de ces trente ONG, les banques suisses ont prêté ou aidé à lever 5,7 milliards de dollars à des entreprises de la GCEL en 2021. Depuis 2019, les banques suisses ont canalisé 19,8 milliards de dollars d’argent frais vers cette industrie. Entre 2019 et 2021, près de 8,5 milliards sont allés à des entreprises qui ont des projets d’expansion de mines ou de constructions de nouvelles centrales à charbon. Glencore, plus grand exportateur mondial de charbon, est le principal bénéficiaire de ces fonds.
En plus de prêter de l’argent aux entreprises de la GCEL ou de lever de l’argent pour elles, les banques suisses continuent d’y investir. Fin 2021, elles détenaient plus de 22 milliards de dollars d’actions et d’obligations d’entreprises de la CGEL. Le classement comprend UBS avec 7,6 milliards investis, le Groupe Pictet avec 6,2 milliards, Credit Suisse avec 2,6 milliards, la Banque nationale suisse avec 2,5 milliards et la Banque cantonale de Zurich avec 0,6 milliard. Ces investissements sont évitables : d’autres banques suisses montrent qu’il est possible de mener une authentique politique climatique. Depuis le 1er janvier 2022, la Banque cantonale de Berne bannit toute entreprise active dans les énergies fossiles – charbon, pétrole et gaz – des portefeuilles de placement de ses clients. La banque cantonale de Bâle-Campagne prend une voie similaire.
Par ailleurs, la non-transparence des banques sur le contenu de leurs fonds de placement trompe leurs clients. Classé parmi les fonds durables, le fonds de placement Pictet Clean Energy R indique, parmi les secteurs qu’il exclut, le charbon. Il investit pourtant fortement dans l’entreprise allemande RWE, l’un des plus gros producteurs d’électricité à base de charbon en Europe.
Besoin de régulation
De nombreux militants, des actionnaires et des personnalités appellent Credit Suisse, UBS et la BNS à adopter des politiques de placement en phase avec l’évolution du climat. Mais leurs appels restent sans réponse. Le Conseil fédéral et des organisations faîtières rêvent de voir la Suisse devenir un hub international de la finance durable. Mais réaliser cette vision exige que l’Etat intervienne. Il lui revient d’introduire un devoir de transparence et des objectifs clairs de réorientation des flux financiers compatibles avec la cible de l’accord de Paris de ne pas dépasser 1,5°C de hausse de la température.
En janvier 2022, le président de Credit Suisse a dû démissionner pour avoir enfreint plusieurs quarantaines. Est-il acceptable que ces institutions financières continuent d’aggraver la destruction du climat sans être sanctionnées ? A quand des sanctions pour destruction de ce bien commun si nécessaire à l’avenir qu’est le climat ?
La Global Coal Exit List
Les entreprises qui figurent sur cette liste remplissent l’un des trois critères suivants :
- au moins 20 % de ses revenus proviennent de l’exploitation du charbon ;
- au moins 20 % de l’électricité qu’elle produit proviennent du charbon ;
- elle produit au moins 10 millions de tonnes de charbon par an ou détient au moins 5 gigawatts de puissance électrique alimentée au charbon ;
- elle prévoit de nouvelles centrales électriques au charbon, des mines de charbon ou d’autres infrastructures pour l’industrie du charbon
Les chiffres sur les financements
Les chiffres publiés aujourd’hui sont les plus complets à ce jour sur la responsabilité globale des acteurs financiers suisses dans le maintien de la filière énergétique la plus nocive pour le climat. Ils proviennent du travail d’Urgewald, Reclaim Finance, 350.org Japan et 25 autres ONG partenaires. Les données ont été fournies par Profundo, bureau spécialisé basé aux Pays-Bas. Cette liste exclut les financements qui sont canalisés vers les activités qui ne relèvent pas du charbon ou qui sont destinées à l’amélioration des performances écologiques.
Pour accéder au communiqué de presse international et aux données internationales :
Données détaillées sur le financement du charbon par la place financière suisse